Interview de Sona Gabrielyan, directrice de Switzernet
- A propos de Switzernet
- Switzernet et ses concurrents
- Public cible
- VoIP vs téléphonie traditionnelle
- Liens utiles
A propos de Switzernet
Comment avez-vous eu l’idée de lancer Switzernet?
Ayant
travaillé dans le «wholesale» des télécommunications, j’ai constaté que
les opérateurs dégageaient d’énormes marges de profit. Le VoIP permet de
revoir ces tarifs à la baisse. Nous avons souhaité en faire bénéficier les
utilisateurs.
Quel est votre principal défi?
Nous devons convaincre nos
clients potentiels que cette nouvelle technologie leur offre non seulement
la possibilité de réaliser des économies substantielles mais leur permet
également d’accéder à d’autres services. Il s'agit également de rassurer:
téléphoner via Internet c'est téléphoner «comme avant».
Comment fonctionne la société Switzernet?
La société compte
quatre collaborateurs qui assurent aussi bien le service de support de
premier niveau que les travaux administratifs. En cas de problème majeur,
nous faisons appel à des techniciens externes. Au besoin, nous apportons
notre soutien technique lors de l’installation les appareils, bien que les
téléphones que nous vendons soient préconfigurés.
Nous avons deux serveurs, l’un se trouve en Suisse et l’autre au One Wilshire Building à Los Angeles. Cent vingt sociétés de l’industrie des télécommunications, dont les leaders mondiaux, y ont leur siège («The most connected building» ndlr). Pour nous, cette proximité est un atout.
Dans un article paru dans l’AGEFI du 24 février 2006, votre
entreprise a été qualifiée de «Skype vaudois». Qu’en
pensez-vous?
Nous avons comme objectif de populariser la
technologie et de proposer des services à très bas prix. Pour le moment
nous ciblons le marché helvétique et surtout la Suisse romande.
L’expression «Skype vaudois» me convient donc tout à fait.
Switzernet et ses concurrents
Qu’est-ce qui vous différencie de Skype?
La stratégie de
Skype consiste à offrir en téléchargement un logiciel propriétaire et
gratuit. Il s’agit donc avant tout de connexions via ordinateur.
Nos clients, quant à eux, reçoivent dès le départ un numéro d’appel suisse et un appareil téléphonique ou un adaptateur leur permettant de brancher leur téléphone conventionnel au Net. Les communications réalisées au moyen d’un PC n’est qu’un service annexe.
La facturation chez Switzernet est incrémentée à la seconde, alors que Skype arrondit à la minute supérieure. Nous acceptons le paiement par facture. J’ai constaté que les Suisses se montrent réticents à payer leurs frais par carte de crédit.
Comment vous est-il possible de proposer des tarifs si
attractifs?
Nous traitons directement avec près de 900 opérateurs
dans le monde entier; nous travaillons sans intermédiaire. Nos clients
profitent ainsi des tarifs de gros et nous leur vendons les communications
à prix coûtant.
Certains contrats couvrent plusieurs pays. Le contrat passé avec France Telecom par exemple nous permet d’assurer les liaisons téléphoniques dans les DOM/TOM.
Pourquoi proposez-vous des appels gratuits à destination de certains
pays alors que d’autres communications sont payantes?
Les tarifs
dépendent des conditions contractuelles négociées avec les opérateurs.
Prenons le cas de la Chine: nous facturons ce que nous payons à notre partenaire, soit CHF 0.04 la minute. La distance ne joue aucun rôle.
Quels sont vos concurrents en Suisse?
Il existe un certain
nombre d’entreprises qui proposent des solutions VoIP, et en général les
communications sont facturées. En Suisse romande, nous sommes les seuls à
proposer des services gratuits de cette nature.
Public cible
Quel est votre public cible?
Les particuliers avant tout. Les
utilisateurs qui possèdent un abonnement ADSL – et disposent donc obligatoirement d’un
branchement téléphonique commuté – sont plus difficiles à convaincre que
les personnes qui reçoivent Internet par le câble. Ces derniers
abandonnent plus facilement leur abonnement chez Swisscom.
Notre cœur de marché se situe en Suisse romande et en France voisine. Nos clients français peuvent se connecter chez eux tout en utilisant un numéro suisse sans frais de «roaming» – c’est-à-dire sans frais d’itinérance. Les commandes depuis l’étranger se font uniquement contre prépaiement.
Quant à la Suisse alémanique, elle nous intéresse. A l’heure actuelle, nous n’avons malheureusement pas de grands moyens pour développer une stratégie de communication outre-Sarine.
Comptez-vous des entreprises parmi vos clients?
C’est un
marché plus complexe et plus exigeant. Des normes de sécurité doivent être
respectées. De plus, beaucoup entreprises ne souhaitent pas abandonner
leur numéro de téléphone au profit d’un numéro Switzernet. Mais nos
partenaires sont en mesure d'assurer toute l'installation technique.
Certaines PME conservent leur ligne analogique pour les appels entrants et utilisent notre technologie pour les appels sortants. Cette solution leur permet de réaliser des économies importantes.
Combien d’abonnés avez-vous?
Environ 2000. Chaque jour, nous
enregistrons une dizaine de nouvelles inscriptions, souvent grâce au
«bouche-à-oreille».
Le fait de devoir acheter un téléphone IP ou un adaptateur ne
constitue-t-il pas un frein au développement commercial?
De mon
point de vue, l’achat d’un appareil téléphonique compatible IP est
rapidement amorti, compte tenu des tarifs que nous pratiquons par
ailleurs.
VoIP vs téléphonie traditionnelle
Quels sont les avantages de votre technologie par rapport à la
téléphonie traditionnelle?
Principalement, la téléphonie par
Internet permet de contourner les opérateurs intermédiaires et de proposer
des tarifs de gros.
De plus, vous pouvez, où que vous soyez
dans le monde, brancher votre téléphone Switzernet directement à la prise
«Internet» et être toujours joignable. Ni vous, ni votre correspondant ne
payerez de frais d’itinérance. Et si vous êtes en déplacement, converser
via votre Mac ou votre PC portable ne posera aucun problème.
Notre offre constitue une véritable alternative face aux offres des opérateurs traditionnels qui s’essoufflent. A l’avenir, ils seront obligés de proposer des solutions compétitives et, pour moi, le VoIP est l’avenir de la téléphonie.
On entend souvent que la qualité de transmission de la téléphonie
traditionnelle est supérieure à celle du VoIP. Qu’en
pensez-vous?
Il est vrai que les communications peuvent subir
quelques coupures. Nous sommes sur le Net! Mais la technologie
évolue à grands pas. Pour améliorer la qualité, nous collaborons
étroitement avec l’Ecole polytechnique fédérale (EPFL), les universités de
Fribourg et de Genève. Dans le cadre de stages, nous proposons des projets
aux étudiants.
Vos clients reçoivent un numéro de téléphone du type 021 / 550 XX
XX. Vos abonnés peuvent-ils conserver leur ancien numéro d’appel?
Nous avons acheté 10'000 numéros commençant par 021 550
directement auprès de l’Office fédéral des communications (OFCOM).
Pour l’instant la portabilité des numéros de téléphone, c’est-à-dire le transfert d’un numéro attribué par un autre opérateur, n’est pas possible. Des négociations sont en cours. Mais je précise que de telles demandes de la part de nos clients ne sont pas très nombreuses. Le 550 n’est-il pas d’ailleurs le signe distinctif de notre communauté?
Propos recueillis par Eva Ackermann et Erwan Burkhart
Dossier: Communiquer sans débourser: le grand défi de la téléphonie par Internet